Les œuvres de Peter Land jouent sur une variation constante entre tragédie et ironie, illusion et désillusion. Elle oscillent entre la recherche du sens de l’existence et la prise de conscience de son absurdité. L’humour est omniprésent et pénétrant dans ses représentations d’un anti-héros qui fait des expériences douloureuses par le truchement de mises en situation d’apparence insignifiantes. Incidents inoffensifs et petits accidents sont répétés suffisamment de fois pour que leur aspect de prime abord comique, prenne au fil de l’action une dimension tragique. Par le biais de dessins, films et photographies, le spectateur est amené à questionner sa propre perception. P. Land manie des références empruntées aux comédies « tarte à la crème » et au théâtre de l’absurde, mais le rire initial qu’il provoque fait toujours place au sentiment coupable d’avoir été le témoin désengagé de quelque chose de confus et de douloureux.
Après des débuts de peintre, inspiré par la tradition expressionniste abstraite, P. Land se heurte rapidement à la frustration de ne plus savoir pourquoi il peint. Il entame alors, dès 1994, une production de vidéos qui supplante son activité de peintre. Dans « Peter Land 5 May 1994 », sa deuxième vidéo, P. Land fait « table rase » et se met à nu pour nous montrer « ce qui reste quand toutes les valeurs culturellement et socialement apprises ont été démasquées, annulées et supprimées ». Ivre-mort, il dévoile, sans inhibition, son corps imparfait dans une manifestation de vitalité et une volonté dexister malgré tout. Le rire et la souffrance sont intimement liés.
Après trois ans d’interruption, P. Land se remet à dessiner. Ses œuvres entre caricature et bande dessinée deviennent une introduction directe à son monde fantastique : un monde en apesanteur où les angoisses, les fantasmes et les rêves se révèlent.
P. Land est lunique acteur de ses vidéos. « La vidéo me permet de me présenter dans différents rôles. Face à la caméra, possibilité mest donnée dincarner un fantasme personnel comme forme dexpression dune position sociale. » Un démaquillage psychologique combiné à une nécessité dauto-préservation face au risque dune dissolution mentale qui conduirait à lapathie. Une telle démarche, qui procède dun recentrage constant vers lhonnêteté, propose de dépasser un niveau individuel au profit de lexpression dun problème universel.
Dans « The Lake » (1999), nous sommes témoins de la dernière promenade dun chasseur, habillé de pied en cap, gourde de whisky, cadre bucolique, sur fond de « La Pastorale » de Ludwig van Beethoven. Survient alors laction tragique. Le gibier est substitué par lembarcation contre laquelle le chasseur retourne son arme. Absurde et tragique, ce mode de « suicide » vient résoudre lénigme de cette mise en scène dans laquelle lacteur nest que lobjet dun destin contre lequel il ne tente rien.
« Lidée que le monde continue au-delà de ma mort ma toujours terrifié mais je songe que je devrais en fin de compte la trouver rassurante. »
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