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  Deimantas Narkevicius 

expositions temporaires
Trois sur trois  
Deux sur trois  
Un sur trois   

 
 



Deimantas Narkevicius, Trois sur trois

in Futur antérieur, séquence d'automne 2009
L'Espèce de chose mélancolie  /  du 28 octobre 2009 au 17 janvier 2010

The Head (2007) retrace la réalisation d’un buste monumental de Karl Marx pour la ville de Cheimnitz qui se nommait, jusqu’en 1990, Karl-Marx-Stadt. On découvre son créateur, Lev Jefimovich Kerbel (1917-2003), sculpteur renommé dans l’ancien bloc soviétique et lauréat du prestigieux Prix Lénine. Un fait d’importance puisque sa légende veut que ce soit l’annonce de la mort de Lénine qui ait été à l’origine de son premier moulage de cette figure illustre, déterminant sa carrière future. Si le film fait mention de son inclination pour Lénine, il se focalise plutôt sur son œuvre la  plus prestigieuse réalisée en République Démocratique Allemende : le monument de Karl Marx.


Le projet de Deimantas Narkevicius propose une véritable réflexion sur la question du monument et, de manière plus générale, il interroge la façon dont l’art est perçu selon le contexte historique, social et politique dans lequel il s’inscrit. Son film a été spécifiquement conçu pour l’exposition décennale de sculpture dans l’espace public à Münster. Depuis 1977, des projets éphémères côtoient des réalisations permanentes. Ainsi, de nombreuses sculptures ornent toujours la ville, comme Giant Pool Balls de Claes Oldenburg (1977), devenu l’emblème de la ville, ou des œuvres d’autres figures historiques de la modernité tels que Donald Judd, Thomas Schütte et, plus récemment, Bruce Nauman pour n’en citer que quelques-unes. C’est précisément dans ce contexte qui questionne, au fil des éditions, le changement de statut, de forme et de signification de l’art dans l’espace public que D. Narkevicius proposait de reconsidérer notre regard sur le monument historique. Initialement, il souhaitait emprunter le buste de Karl Marx à la ville de Cheimnitz pour le montrer temporairement à Münster. Bien que le démantèlement et le transport d’une œuvre de sept mètres et de quarante tonnes puissent être problématiques, ce n’est pas cet aspect logistique qui a empêché la réalisation de ce projet mais bien une forte mobilisation locale contre le déplacement et l’exposition de ce monument dans un lieu qui apparaissait comme étant encore situé de l’autre côté du « Mur ». D’une certaine façon, le geste de D. Narkevicius se place également dans ce clivage entre l’Est et l’Ouest et ce malgré la dissolution des deux blocs.

Ce sont ces circonstances et l’échec du projet initial qui ont donné forme au film. Avec cette œuvre, D. Narkevicius s’interroge sur la place historique du réalisme socialiste et son rapport au modernisme international puisque, d’une certaine façon, ce style se développe aussi en réaction ou en miroir avec la modernité occidentale. Ces monuments demeurent les meilleurs témoignages d’une idéologie autoritaire et mettent en lumière la place minime de la créativitié individuelle par rapport aux canons esthétiques imposés par le régime communiste. En se focalisant sur le portrait de L. J. Krebel, D. Narckevicius appelle à faire une distinction entre l’individu et le régime dans lequel il évolue et, d’une certaine manière, c’est aussi le contexte de sa propre formation artistique qu’il nous livre. Plus généralement, le monument, qui est une forme récurrente dans le travail de D. Narkevicius, est le moyen d’interroger les changements qui se sont produits dans l’ancien bloc de l’Est à partir des années 1990. On se souviendra du film Once in the XXth Century (2004) présenté lors du premier volet d’exposition que le Mamco a consacré à l’artiste. En utilisant le film d’une manifestation joyeuse, il exposait le moment historique de libération de la Lituanie du joug soviétique mais, par le montage du film à l’envers, la statue de Lénine paraissait être réinstallée sur son socle. D. Narkevicius s’interrogeait déjà sur la pertinence du démantèlement de tous les monuments de l’ère soviétique. Le regard qu’il porte sur le monument est dénué de toute nostalgie. Il s’interroge plutôt sur la manière un peu rapide de se débarrasser de tout un pan de l’histoire. Dans un autre film, The Role of the Lifetime (2003), il relatait précisément le destin des monuments démantelés qui finissent exposés dans des « parcs à thème » dont le but affirmé est de dénoncer l’idéologie soviétique. Ce récit montre aussi comment la mémoire et l’oubli peuvent devenir des armes politiques ; comment l’idéologie, quelle qu’elle soit, occupe une place dans la réalité et pourquoi sa compréhension et sa critique constituent un défi important.


Deimantas Narkevicius est né en 1964, il vit à Vilnius (Lituanie).